Le féminicide est le fait de tuer une femme, simplement car elle en est une. Chaque année, le décompte reprend, et les chiffres sont glaçants. Ce crime sexiste a tué 121 femmes cette année. Cette croyance commune comme quoi cela n’arrive qu’aux autres est fausse, on trouve le féminicide dans toutes les tranches d’âge, tous les corps de métiers et tous les milieux sociaux. Voici un témoignage rare et une réflexion autour de cet acte, par une femme qui en a réchappé.
Le féminicide, elle y a échappé
Il a essayé de me tuer. C’est des mots que j’ai prononcés il y a de cela bientôt 1 an, tremblante, au milieu du salon.
Il n’avait jamais été violent physiquement avant que je le quitte, c’était soudain, c’était brutal, j’ai vécu tout cela comme une absurdité sans nom.
Je crois que j’en ai peu parlé, et à très peu de gens, car en soi, on nourrit une honte, une culpabilité d’avoir si mal choisi son partenaire, mais je crois qu’il est important de se rendre compte que les monstres n’existent pas, que l’on peut vivre une jolie relation avec quelqu’un, et découvrir un aspect complètement étranger de lui bien plus tard.
Ces hommes qui dénient le droit de vivre sans eux aux femmes, j’ai découvert qu’ils ressemblaient à tout le monde, c’est ce que disent aussi tous les articles sur les féminicides, des histoires macabres où le point commun est toujours le même, des hommes de tous profils qui refusent l’existence propre de l’autre.
Ils ne sont pas fous ces hommes-là, mais ils vivent dans un monde où la femme est constamment réifiée, ramenée sans cesse à la qualité principale que l’on attend d’elle, sa beauté. Sauf que la beauté ça ne parle pas, la beauté ça se contemple, c’est passif, ça n’a pas d’existence propre, ça n’existe que pour l’autre. Et c’est ça qui est incroyable, que ce soit cela la chose principale qui nous soit demandé, que notre rôle soit d’incarner un modèle qui fasse plaisir aux autres, et sur le modèle patriarcal, c’est faire plaisir aux hommes en fait.
Le monde entier nous explique que nous existons pour leur plaire, et si notre seule utilité c’est d’être un reflet dans leur regard, finalement nous n’existons même pas vraiment, alors c’est quoi le problème à nous supprimer ?
Alors oui, en arriver au point de commettre ce genre d’acte a des causes multifactorielles, mais il faut arrêter de croire que c’est un hasard si c’est une écrasante majorité d’hommes qui tuent, agressent et violent des femmes, et que le contraire fait figure d’exception.
J’ajoute ma pierre à cet édifice de violence, pour peut-être que les gens qui crachent sur le féminisme en comprennent l’utilité, pour continuer à guérir aussi et transformer la honte en fierté, car je crois qu’elle est là, la vraie beauté, c’est celle d’être debout, en survivante.
Le féminicide et la sociologie
On peut souligner le travail exceptionnel de la journaliste Titiou Lecoq, qui a recensé et documenté les féminicides en France pendant plusieurs années. Et qui a cherché des explications à ce phénomène.
« Il y a ceux qui étranglent à mains nues, ceux qui plantent un couteau de cuisine dans le cou, ceux qui brûlent vivantes leurs victimes, ceux qui lui tirent dessus au fusil de chasse, ceux qui ont cogné jusqu’à la mort. Il y a ceux qui appellent la police pour dire “j’ai tiré au fusil dans la tête de ma femme”, ceux qui appellent les secours en expliquant qu’“elle a glissé dans la salle de bain”. »
Là encore, dans cette multitude de récits, un point commun rassemble ces hommes : « Ce sont des hommes qui tuent des femmes parce qu’ils considèrent qu’elles doivent leur appartenir. » Et de faire une mise au point : « Ils ne tuent jamais par amour. Ils ne tuent pas parce qu’ils aiment trop. Ils tuent pour posséder, et posséder ce n’est pas et ce ne sera jamais aimer. »
Pour Titiou Lecoq, ce nombre de féminicides met en lumière un constat cruel, celui d’une société fondée sur une domination masculine coriace, qui donne aux hommes, « en son point le plus extrême, le droit de vie et de mort ».
Meurtres conjugaux : plus de 200 femmes tuées en deux ans, selon le recensement de « Libération » (lemonde.fr)
À l’attention des commentaires
Pour ceux qui auraient l’indécence de commenter avec des “mais moi je suis pas comme ça”, oui les femmes sont au courant que tous les hommes ne sont pas ainsi, on parle d’une violence systémique et pas individuelle donc merci de lire un témoignage difficile à livrer sans chercher à vous replacer au centre de la lumière, c’est complètement déplacé.
Ressourcerie
Si vous avez été victime de violence, vous pouvez chercher de l’aide dans cette liste ou prendre rendez-vous avec un professionnel.
Accueil – France Victimes (france-victimes.fr)
Accueil – CIDFF (fncidff.info)
Violences Femmes Info – Appellez Le 3919 ,accessible 24h/24 et 7 jours sur 7 | Service-public.fr
Fédération Nationale Solidarité Femmes | Homepage (solidaritefemmes.org)